Xtro de Harry Bromley Davenport (1983) et Basket Case
de Frank Henenlotter (1982) ont en commun une réalisation proche de
l’artisanat avec un budget se réduisant à une peau de chagrin, le tout
sous l’égide de distributeurs en mal d’effets gore (très à la mode à
l’époque, le "Sick Movie") et de scènes coupées ou remontées à leur
guise. Un autre point commun me donne l’envie de faire un parallèle
entre ces deux films « fauchés » et très personnels : la thématique de
la filiation dans ce qu’elle a de plus contraignante ! Mais attention
aux éclaboussures, car on risque de se mettre du sang partout...
Dans Xtro,
un anglais, Sam Phillips, se fait enlever par des extraterrestres sous
les yeux terrifiés de son jeune fils Tony. Trois ans plus tard Sam
revient sur terre sous l’aspect d’une créature monstrueuse. Bien décidé à
renouer avec sa famille, Sam réussit à retrouver son aspect d’homme,
(je reviendrai sur cette scène horrible et culte) afin de transmettre
ses pouvoirs surnaturels à Tony et perpétuer ainsi une nouvelle espèce.
Pour Basket Case (Frères de sang), Duane, un jeune blondinet débarqué de sa province, s’installe dans un hôtel de passe en plein cœur de la sordide 42ème rue d’un New-York du début des années 80. Le jeune homme a été séparé à l’adolescence de son frère siamois, Bélial, par des chirurgiens sans scrupules. Encombré d’un énorme panier en osier, Duane veut se venger…
« What’s in the basket ? » Telle est la question récurrente pour chacune des futures victimes de Duane et Bélial.
Tandis que Xtro veut évoquer les films de science-fiction américains des années 50 dans une trame plutôt classique, comme La Guerre des Mondes, Basket Case rappelle (si on est une chroniqueuse audacieuse) Sisters de Brian De Palma, Eraserhead , mais surtout les films trash de Herschell Gordon Lewis et ceux de John Waters.
Harry B. Davenport voulait avant tout pour son second film (le premier, Whispers of Fear,
lorgnait plutôt vers le thriller) étonner, surprendre voir provoquer le
spectateur faisant fi de la qualité des effets spéciaux (à noter les
différents aspects des extraterrestres pourtant issus de la même espèce,
ou le mode de procréation lui-aussi un peu trop varié), tout comme
Franck Henenlotter se fichait du rendu « cheap » de la technique
stop-motion et de l’aspect caoutchouteux de Bélial, le frère siamois du
blondinet benêt.
Le but des deux réalisateurs étant de contrer la vague politiquement
correct qui commençait à déferler avec la grosse machinerie
Spielbergienne : les gentilles créatures n’ont pas toutes de grands yeux
bleus innocents.
Les deux films se divisent en deux parties : la partie sociale et la partie « agressive ». Cette dernière partie étant « adoucie » pour Xtro par les scènes « oniriques » avec Tony, mais accentuant par là même, les scènes gores dont la fameuse « scène du viol par l’extraterrestre ». Je l’avais promise, la voici donc cette scène devenue culte : la créature de l’espace « engrosse » une jeune femme. Sam renaît instantanément des entrailles de la pauvre victime. C’est ce qu’on appelle une fécondation express ! Choquant 27 ans après. Dans Basket Case les scènes deviennent de plus en plus gores à mesure que Bélial comprend son implacable marginalité : la fiancée de Duane rendra Bélial fou de jalousie et poussera celui-ci à « convoiter » la promise de son frère. Le père des deux frères siamois, après avoir été retrouvé, se verra « tranché » en deux, puis l’un des chirurgiens comprendra l’effet du scalpel sur son propre visage. Attention aux âmes sensibles ! Mais on peut déceler dans ces deux films extrêmement gore, une note (légère certes) de poésie macabre. Pour Basket Case : Bélial, cette aberration de la nature, ce freak, écoute paisiblement au coin du feu, sur les genoux de sa tante adoptive, un conte pour enfant. Touchant, malgré les élans imprévisibles de Bélial, tel le refus de la société quand il fait tomber un téléviseur offert par son frère. Duane quant à lui, se rêve nu parcourant les rues d’un New-York endormi. Dans Xtro, les rêves et les jouets de Tony prennent vie grâce aux pouvoirs de son père. Mais Tony n’est pas Elliot et très vite les rêves de l’enfant deviennent un enfer pour le voisinage.
C’est surtout le mauvais goût, parfois grossier, qui a la part belle dans Basket Case, tandis que Xtro hésite perpétuellement entre film d’horreur moderne et onirisme agressif. Franck Henenlotter, lui, en digne héritier de John Waters, mais malgré une réalisation difficile à cause des conditions de tournage (les décors sont ceux d’un vrai hôtel de passe dans les bas-fond de New-York) joue la carte des couleurs jaunâtres, de l’interprétation douteuse, d’un éclairage sombre et d’une animation hasardeuse pour Bélial. Ainsi chaque scène deviendra culte car complètement ringarde. D’ailleurs ce sont les fans de la première heure qui pousseront le distributeur américain à « rendre » toutes les scènes intactes à Basket Case. Ces deux cinéastes alternatifs resteront marqués par leurs premiers films et Harry B. Davenport réalisera trois Xtro pour disparaître dans les oubliettes du film d’horreur, tandis que F. Henenlotter réalisera Brain Damage, sorte de remake plus « léché » de son Basket Case, qu’il disait à l’époque détester, puis le plus connu : Frankenhooker (1990) et enfin Basket Case 3 : The Progeny avec pour ces deux séquelles, la collaboration de Bob Martin le rédacteur-en-chef de la mythique revue Fangoria.
A (re)découvrir si l’on veut connaître deux pièces maîtresses d’œuvres fauchées venant droit du cinéma d’exploitation dont l’honnêteté féroce et le mauvais goût volontaire des réalisateurs ne sont certainement pas à mettre en doute.
Titre français : Frère de sang
Réalisation : Frank Henenlotter
Scénario : Frank Henenlotter
Photographie : Bruce Torbet
Pays d'origine : États-Unis
Genre : horreur
Durée : 91 minutes
Date de sortie : 1982
Titre : Xtro
Réalisation : Harry Bromley Davenport
Scénario : Ian cassie & Robert Smith
Production : New Line Cinema
Photographie : John Metcalfe
Pays d'origine : Grande-Bretagne
Genre : science-fiction & horreur
Durée : 1h20
Date de sortie : 1982
Article publié sur le site Mondes étranges.fr en 2010
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